Comme beaucoup de nos amis moldaves, nous avons immigré au Québec en 2010. À l'époque, nous n'avions pas à passer de test de français pour être acceptés. Finalement, après 7 mois d'attente, je suis arrivée à Montréal avec mon mari et nos deux enfants.
Nous avons immigré au Québec les « yeux fermés », sans parler français et sans aucun préparatif en amont. Quand est venu le moment de chercher du travail, mes lacunes en français ont été un réel handicap. Je me suis donc inscrite aux cours de francisation que j'ai suivis durant deux mois et demi. Parrallèlement, j'avais été recrutée comme commis dans une épicerie. Cet emploi m'a permis de connaître tous les noms des fromages du Québec mais la job ne m'intéressait pas vraiment !
Je savais qu'au Québec, je ne pouvais exercer ma profession de professeur d'histoire comme en Moldavie. Je me suis donc inscrite pour un baccalauréat en Sciences politiques à l'Université de Montréal (UdeM). Lors de mes études, j'ai eu la chance d'être auxiliaire de recherche pour l'un de mes professeurs. Je travaillais comme traductrice environ 10 à 15 heures par mois pour 15 $ CAN de l'heure. Mon professeur m'a beaucoup soutenue dans mes démarches d'apprentissage du français et m'a appris la culture québécoise.
Durant mon bac, je devais faire un stage en entreprise afin de m'intégrer plus facilement sur le marché du travail local. J'avais envoyé beaucoup de candidatures mais je recevais uniquement des réponses négatives. J'ai rencontré le psychologue de mon université puis le service d'orientation qui m'a aidé à refaire mon CV aux normes québécoises. Cependant, je n'avais toujours que des refus. Après un nouveau retour négatif d'une entreprise, j'ai demandé à celle-ci ce qui n'allait pas dans ma candidature. Mon français n'était pas assez bon et je n'avais pas d'expérience en finance pour trouver un emploi dans les sciences politiques.
Ce retour m'a fait beaucoup réfléchir sur mon orientation professionnelle et mes recherches d'emploi. J'ai décidé de faire mon stage dans le domaine de la finance pour pouvoir par la suite faciliter mon insertion professionnelle dans les sciences politiques. Pour ce stage, je devais auparavant obtenir l'examen de l'autorité des marchés financiers pour avoir le permis d'exercer. Je me suis formée durant 5 semaines, contre une année habituellement, pour obtenir mon permis en assurance de personnes. Je me suis beaucoup investie pour le réussir et cela n'a pas été facile. Je devais étudier la fiscalité, le droit, etc. malgré mes difficultés en français. J'ai eu mon examen et j'ai, par la suite, commencé mon stage pour 3 mois. J'ai poursuivi cette expérience durant neuf mois en tant que travailleuse autonome. J'ai finalement démissionné car je souhaitais davantage de stabilité dans ma vie professionnelle et j'avais besoin de faire une pause.
Parallèlement à mes études, j'ai essayé plusieurs fois de passer les examens provinciaux et fédéraux pour obtenir un poste de fonctionnaire. La plus grosse difficulté dans ces examens était la partie concernant les mises en situation. Je ne connaissais pas encore la culture québécoise d'entreprise et cela me posait problème pour répondre à certaines questions très pratiques. Après plusieurs tentatives, j'ai enfin obtenu mon examen et trouvé un emploi auprès de Revenu Québec en tant qu'agente de bureau. Après trois ans d'études mon niveau de français s'est beaucoup amélioré. Je suis désormais parfaitement intégrée dans l'équipe.
Avec du recul, je ne referais pas les mêmes erreurs. Arriver au Québec sans connaître un minimum la langue française et le marché de l'emploi a représenté un vrai handicap. Il ne faut cependant pas lâcher prise et persévérer. Aujourd'hui, je postule toujours pour des emplois de professeur de sciences politiques dans des collèges en espérant avoir une opportunité.
Finalement, nous avons tellement aimé Québec et sa région que nous sommes restés. C’est tellement pittoresque et romantique. On a l’impression d’être dans un décor de carte postale ici. Il y a plein de festivals, les gens sont très gentils et on y mange très bien.
L’insécurité de l’emploi, le manque de revenus suffisants pour cotiser à un régime de retraite privé ainsi que l'éloignement familial nous ont fait envisager un retour en France.