Elle est sur toutes les lèvres et c’est avec un certain enthousiasme que le Québec se prépare à la fêter dignement au cours de la dernière longue fin de semaine de l’année. Mais si l’Action de grâce évoque pour beaucoup festin en famille, elle marque une très belle tradition ancestrale qui a formidablement évolué. Voyage à travers une brève histoire de l’Amérique du Nord.
C’est en 1957 que le Parlement canadien instaure un jour férié, le dernier de l’année avant les Fêtes, pour remercier Dieu de l’abondance des récoltes et, par extension, des bonheurs reçus durant l’année écoulée. C’est ainsi que la fête de l’Action de grâce, ou Thanksgiving pour les anglophones d’Amérique du Nord, occupe tous les esprits chaque second lundi d’octobre – au Canada, en tout cas. En effet, cette tradition est ancienne et n’est pas célébrée partout de la même manière.
Une tradition religieuse venue d’Europe
On fait généralement remonter les origines de l’Action de grâce en Amérique du Nord à un certain souper, tenu en 1578 par l’explorateur anglais Martin Frobisher, qui souhaitait rendre grâce à Dieu d’avoir survécu à son voyage et de jouir de la santé. Ce souper s’est ainsi fortement inspiré des fêtes de la moisson célébrées par les paysans européens.
Mais la tradition de l’Action de grâce prend ensuite des chemins fort différents au Canada et aux États-Unis, où la symbolique de Thanksgiving, importée par les Pères pèlerins du Mayflower, a une valeur quasi-fondatrice : celle de la première récolte, en 1621, et donc celle de la survie de la jeune colonie. Autre différence : on fête Thanksgiving plus tard aux États-Unis : le quatrième jeudi de novembre. On raconte que les moissons y seraient plus tardives, du fait de la situation géographique plus clémente du pays.
Le Thanksgiving canadien ne prétend pas à de telles racines historiques et est davantage emprunté, dans sa forme actuelle, à celui de son voisin américain. C’est ainsi que, même s’il est largement célébré aujourd’hui, en particulier chez les anglophones, il demeure moins ancré dans les traditions populaires canadiennes et québécoises.
Remercier et partager
L’Action de grâce est aujourd’hui prétexte à de grandes réunions en famille et entre amis, autour de plats emblématiques – et cette fois bel et bien pan-nord-américains. Traditionnellement, on y sert de la dinde, de la farce, de la purée et de la sauce aux canneberges. À la différence de Noël, on retrouve également au menu des légumes d’automne comme les carottes et les courges, ainsi que la fameuse tarte à la citrouille. Les Pères pèlerins américains avaient même invité une centaine de représentants de la tribu autochtone des Wampanoags, pour les remercier de leur aide à semer et à récolter le maïs.
De la carcasse de la dinde, les Québécois aiment bien retirer ce que l’on appelle « l’os à souhait », ou furculade son nom scientifique. Il s’agit d’un os en forme de « v » ou de « y ». On commence par le faire sécher. Puis on invite deux convives à se saisir chacun d’un côté de l’os et à faire un vœu (sans le dire à haute voix, naturellement !) avant de tirer, chacun, sur son morceau. Celui des deux qui obtient la plus grande partie de l’os verra son rêve se réaliser.
Outre les réunions gastronomiques gargantuesques, beaucoup de Québécois profitent de l’Action de grâce pour perpétuer aussi la célébration des récoltes. On décore sa maison de citrouilles, de cornes d’abondances et d’autres symboles de la moisson.
Et si les signes religieux tendent à disparaître, c’est que la fête de Thanksgiving s’est progressivement laïcisée.
Un phénomène culturel
Ces coutumes et leur signification originelle tendent parfois à s’estomper, au fil des ans, pour laisser place à de nouvelles traditions, là encore bien différentes au Canada et aux États-Unis.
Au Québec, la longue fin de semaine de 3 jours, la dernière de l’année, marque l’occasion, pour certains la dernière de l’année, d’aller s’offrir un grand bol d’air – frais à défaut d’être froid. Randonnées en montagne, visite au chalet et clé des champs sont autant d’occasions de prendre le large et de nourrir l’espoir secret d’observer les couleurs d’automne apparaître sur les arbres.
Aux États-Unis, les enjeux se sont déplacés sur un terrain bien différent. Un mois avant Noël, les très attendus Black Friday et Cyber Monday, qui encadrent Thanksgiving, tiennent le pays en haleine.
Pour le plus grand plaisir des dindes.