Devenir Keb : Une nouvelle série humanise les étapes de l’immigration de l’intégration au Québec

Il est aussi facile de parler d’immigration qu’il est difficile de parler des immigrants, la façon dont eux-mêmes vivent les étapes de leur intégration au Québec et perçoivent leur nouvel environnement. C’est un peu le postulat d’une nouvelle série, produite par Savoir média, intitulée Devenir Keb, qui interroge tour à tour l’humain et la science pour répondre à une question simple : comment ça se passe, pour eux ?

On résume souvent l’immigration à une liste à puces, dont il s’agit de cocher les entrées pour arriver à l’échelon supérieur. Franchir les différents paliers de l’immigration, trouver un emploi, check. Réaliser les premières démarches, chercher un logement, check. Explorer et trouver ses marques dans son nouvel environnement, check. Comprendre les codes au travail, check. Apprendre le français, check. Développer ses premiers cercles sociaux, check.

L’immigration est un projet

Quelque part, c’est aussi l’approche de Devenir Keb, une nouvelle série animée et réalisée par Noémi Mercier et Philippe Desrosiers, qui nous propose un voyage chronologique, presque scolaire, en six verbes à l’infinitif, comme un CV ; six points de contrôle à franchir par les gens d’ailleurs qui souhaitent s’installer et vivre ici.

Arriver. Parler. Travailler. Guérir. Grandir. S’enraciner.

Immigrer est certes un projet qui comporte de froides considérations techniques et de faisabilité, avec la sélection de son « offre de service », un budget, un échéancier, des rendus, des imprévus… Mais la série parvient à trouver l’équilibre entre formalités, éclairages scientifiques, et expérience de l’immigration telle qu’elle est vécue par les personnes intéressées. La façon très personnelle dont ces personnes vivent à la fois la rupture avec leurs origines, le maintien d’une continuité culturelle et l’adaptation aux codes du Québec.

Bienveillance et réalisme

La proximité établie entre les animateurs et les personnes qu’elles suivent, le regard très bienveillant que la série porte sur ces femmes, ces hommes et ces jeunes, renvoient à une image bien connue du Québec, celle de la « terre d’accueil ».

La série explore ainsi certaines des ressources nécessaires au bon accompagnement de ces personnes dans leurs premiers pas au Québec. Elle ébauche la diversité des services d’accueil et d’aide à l’intégration qui sont offerts aux personnes immigrantes, de la francisation, en centre ou en entreprise, jusqu’au mentorat ou au jumelage interculturel, en passant bien sûr par les organismes d’aide à l’intégration socioprofessionnelle.

Mais si la société s’organise pour ces personnes, et nombreux sont ceux qui s’impliquent au quotidien auprès des nouveaux — et moins nouveaux — arrivants, on constate aussi les limites d’un système qui peine à trouver l’adéquation entre les attentes que l’on place sur les personnes immigrantes (francisation, reconnaissance des compétences, etc.) et la réalité de ces personnes, qui ont la responsabilité de s’acclimater pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille.

Le scénario idéal

De l’arrivée d’une personne à son enracinement, il n’y a bien sûr pas qu’un pas. Mais s’il manque une marche à l’escalier social qui nous est offert par la série, c’est celui de l’échec. La rupture consommée.

Plusieurs fois, on évoque ouvertement quelques sujets plus lourds — toujours à travers les expériences vécues par les personnes immigrantes : isolement, racisme, difficulté à se sentir pleinement intégré, doute, incompréhension, en particulier par les enfants accompagnants, qui peuvent ne pas prendre la mesure et les conséquences d’un projet qui n’est pas le leur…

Mais il est une autre réalité de l’immigration dont on parle certes peu, en dépit de sa grande actualité : celle du retour. À travers les épisodes Guérir et Grandir, on opère une très belle distinction entre l’immigration économique et l’immigration humanitaire. L’immigration volontaire et celle que, dans d’autres circonstances, on n’aurait peut-être même pas envisagée. Il en va de même avec le retour. On peut le choisir. Ou bien on peut le subir. Dans tous les cas, l’enracinement se transforme alors, parfois brutalement, en un nouveau déracinement.

Alors, qu’est-ce que ça prend pour Devenir Keb ?

Ce que la série nous révèle, c’est que peu importe d’où l’on vient : l’immigration est une œuvre inachevée — tant vis-à-vis de soi que dans le regard des autres.

Mais l’autre enseignement, celui qui, invariablement, s’impose comme le fil d’Ariane entre chacune des personnes qui ont contribué à la série, c’est qu’il n’y a pas besoin de se sentir Keb pour devenir Keb, c’est-à-dire embrasser des valeurs communes, contribuer au bien-être de sa société d’accueil, s’épanouir et vivre pleinement sa vie ici…

La série Devenir Keb est accessible sur le site de Savoir média et sur sa chaîne YouTube, de même que sur les principales plateformes de balado.

Photo : Savoir média

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