L’appel des organismes communautaires œuvrant auprès des demandeurs d’asile a été entendu. Une aide d’urgence sera versée à 22 d’entre eux à Montréal, à Laval, en Montérégie et en Capitale-Nationale.
3,5 millions de dollars aux organismes communautaires s’occupant des nouveaux arrivants en situation de précarité, soit les demandeurs d’asile. Une nouvelle qui aide à soulager un milieu à l’épreuve, particulièrement depuis la réouverture des frontières.
Cette aide d’urgence a été annoncée le 6 février 2023 par la ministre de la Solidarité sociale et de l’Action communautaire, Chantal Rouleau, et par Christine Fréchette, ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI).
Une somme qui amorce la création d’un fonds d’urgence, qui, selon Stephan Reichhold, directeur général de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI), répond « à très court terme aux besoins essentiels des personnes immigrantes en situation de précarité ». Elle répond aussi à un appel à l’aide, lancé deux semaines plus tôt par des organismes, constituant ainsi une réponse « fulgurante » et « jamais vu », selon les termes de M. Reichhold.
Quels bénéficiaires ?
3 millions seront versés à Centraide, qui sera responsable de leur redistribution auprès des 22 organismes ciblés de Montréal. Cette somme va soutenir l’aide alimentaire, l’hébergement, l’habillement et l’aide aux familles.
Puis, 12 organismes qui soutiennent l’intégration des nouveaux arrivants, et déjà financés par le MIFI, recevront 500 000 $ CAN. Situés à Montréal, à Laval, en Montérégie et dans la Capitale-Nationale, ces organismes pourront mieux aider à la recherche de logements et à informer les nouveaux arrivants des services auxquels ils ont accès.
Appel à l’aide
Une semaine plus tôt, le 24 janvier 2023, la TCRI coorganisait justement une conférence de presse pour mettre en lumière les besoins des organismes communautaires en matière de financement et de ressources humaines pour répondre aux besoins grandissant des demandeurs d’asile.
Le nombre de demandeurs d’asile a en effet augmenté ces dernières années : ils étaient ainsi 92 175, depuis le seul Québec en 2022, selon des données d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) publiées en janvier 2023.Cela représente une hausse de 44 % par rapport à 2019.
Ainsi, le milieu communautaire interjetait en faveur de :
- La reconnaissance de la contribution des demandeurs d’asile,
- L’admissibilité des demandeurs d’asile à davantage de programmes et services de l’État (les services d’employabilité de Services Québec, l’assurance maladie, etc.),
- Un meilleur financement des organismes d’aide,
- Le renforcement des services d’accompagnement juridiques et la mise en place d’un hébergement provisoire pour les personnes dans le besoin.
Quelle réalité sur le terrain ?
Un enjeu relevé par les organismes de Montérégie, également. C’est en effet dans cette région que se situe le chemin Roxham vers les États-Unis, emprunté par 42 % des demandeurs d’asile en 2022. Depuis la réouverture des frontières et la reprise du traitement des demandes de résidence permanente, les organismes locaux sont submergés par l’afflux de ces personnes.
« On est démunis, débordés par les autres travailleurs temporaires ou résidents permanents. Il y a des jours où des dizaines de demandeurs arrivent chez nous », expliquent Jessica Côté et Khadija Aoutil de l’ANCRE à Saint-Jean-sur-Richelieu. 244 demandeurs d’asile seraient actuellement logés à l’hôtel à Saint-Jean-sur-Richelieu, dont 108 familles, selon des données du MIFI partagées par l’organisme.
« Les députés et autres acteurs sont très conscients de ces enjeux et beaucoup de travail est fait pour débloquer la situation des demandeurs d’asile, notamment pour les rendre éligibles à aux services employabilité de Service Québec », poursuit Khadija Aoutil, la coordonnatrice.
Des questions autour des organismes admissibles au fonds
Bien que l’ANCRE soit un organisme de référence dans la MRC du Haut-Richelieu et qu’il opère en lien direct avec les demandeurs d’asile, il n’est pas admissible au fonds d’urgence « à cause d’une technicalité administrative dans notre entente avec le MIFI », explique Mme Aoutil. Deux autres organismes chargés de proposer des séances d’informations aux populations concernées — mais pas de service d’accompagnement personnalisé — recevront cette aide dans la région.
Mme Aoutil précise que l’ANCRE ne reçoit de financement que pour aider les demandeurs d’asile en matière de logement, dans le cadre du Programme d’accompagnement et de soutien à l’intégration (PASI).
Une aide qui est à la fois difficile à réaliser en raison d’une pénurie de logements, mais aussi insuffisante, car les besoins des demandeurs d’asile vont bien au-delà de la seule question du logement. En effet, l’organisme ne reçoit pas de financement pour les vêtements d’hiver, la banque alimentaire, le soutien administratif, l’accompagnement pour trouver et s’inscrire à l’école, l’employabilité, etc. Autant de services d’accompagnement que l’ANCRE dit pour le moment assumer pro bono.
Reste donc à voir quelles autres aides les autorités proposeront pour répondre aux besoins du terrain. Il a été précisé le 6 février 2023 que d’autres organismes pourraient être soutenus dans un deuxième temps. Une lueur d’espoir pour l’ANCRE et d’autres acteurs de première ligne, auprès des demandeurs d’asile.
Pour accéder au communiqué du ministère de la Solidarité sociale
Photo : Priscilla du Preez