Le 21 octobre prochain, plus de 24 millions de citoyens canadiens auront à voter pour l’élection fédérale du pays, qui vise à renouveler les 338 députés de la Chambre des communes. À l’issue du vote, le chef du parti majoritaire sera désigné Premier ministre du Canada et formera un nouveau gouvernement pour 4 ans. Pour mieux comprendre ce moment clé de la démocratie du pays, voici un tour d’horizon des spécificités du système politique canadien et des principaux enjeux à venir.
Une monarchie constitutionnelle, une démocratie parlementaire et un État fédéral
Héritage historique, le système politique du Canada est une monarchie constitutionnelle inspirée du Royaume-Uni, dans laquelle le monarque, en l’occurrence Sa Majesté la Reine Elizabeth II, est le chef de l’État. Dans les faits, la Reine y est représentée par un gouverneur général, en la personne actuelle de Son Excellence Julie Payette, qu’elle nomme pour 5 ans sur recommandation du Premier ministre du Canada, et dont le rôle est principalement honorifique.
Conformément aux principes de la monarchie constitutionnelle, la Reine règne, mais ne gouverne pas.
C’est le Premier ministre qui s’incarne à la tête du pays semblablement à l’image d’un président de la République, et comme chef du gouvernement, autrement dit du pouvoir exécutif. La convention constitutionnelle canadienne impose strictement qu’il soit un membre de la Chambre des communes. Cette dernière est une des deux Chambres du Parlement, l’institution phare de la démocratie canadienne.
Le Parlement au cœur de la démocratie canadienne
Appliquant le système de Westminster, basé sur celui existant au Royaume-Uni, la démocratie canadienne est parlementaire, elle s’appuie donc sur le Parlement, composé du monarque et de deux Chambres : le Sénat, dite Chambre haute dont les 105 membres sont nommés par le gouverneur général sur recommandation du Premier ministre, et la Chambre des communes dite Chambre basse. C’est cette dernière qui joue un rôle dominant au Canada. La Chambre des communes représente 338 députés élus au suffrage universel direct par les citoyens canadiens selon le scrutin uninominal majoritaire à un tour. Par convention, le chef du parti qui arrive en tête aux élections fédérales, tous les 4 ans, est désigné comme Premier ministre et forme le gouvernement dont les membres doivent tous être issus du Parlement.
Le 19 octobre 2015, avec un taux de participation de 68,3 % pour l’ensemble du Canada, le Parti libéral remportait les élections avec 184 sièges à la Chambre des communes et son chef, Justin Trudeau, était assermenté Premier ministre du pays.
Désormais, la campagne électorale pour le nouveau scrutin du 21 octobre a été officiellement lancée le mercredi 11 septembre 2019. Pendant 40 jours, les différents chefs des partis politiques tenteront de convaincre les électeurs canadiens à travers le pays et participeront à 2 débats télévisés contre Justin Trudeau, l’un en anglais (le 7 octobre) et l’autre en français (le 10 octobre).
Il faut préciser que sur ce territoire immense divisé en six fuseaux horaires et constitué de 10 provinces et 3 territoires, le système électoral canadien possède une spécificité.
La division du pays en circonscriptions
La représentation à la Chambre des Communes est basée sur une division géographique du pays en circonscriptions. Le Canada est ainsi divisé en 338 circonscriptions. Dans chaque circonscription, le candidat élu, celui qui a recueilli le plus de votes, devient le député de sa circonscription à la Chambre des communes. Il y a donc autant de députés que de circonscriptions.
Les sièges sont répartis entre les différentes provinces en fonction de leur population.
Certaines circonscriptions sont en effet très étendues, mais peu densément peuplées. Ainsi, plus une province est peuplée, plus elle dispose de sièges/représentants à la Chambre des communes – et, par conséquent, plus elle a d’influence sur la politique fédérale.
La carte ci-dessous traduit clairement du poids des provinces et territoires dans l’élection fédérale canadienne de 2019 :
Avec respectivement 121 députés (36,8 % de la Chambre), 78 députés (23 % de la Chambre) et 42 députés (12,4 % de la Chambre), l’Ontario, le Québec et la Colombie-Britannique sont des provinces à l’influence majeure où vont se jouer un grand nombre de batailles électorales.
Il est intéressant de mettre ces chiffres en rapport avec ceux du nombre d’immigrants admis par ces trois provinces en 2018, selon l’Institut de la statistique du Québec. L’Ontario a capté près de 43 % des immigrants du Canada, et la Colombie-Britannique 14 %, soit une proportion équivalente et légèrement supérieure au nombre de représentants aux Communes. À l’inverse, le Québec n’a attiré, en 2018, que 16 % de l’immigration nationale, soit 51 200 nouveaux immigrants, soit une proportion largement inférieure à celle de ses représentants aux Communes. Une tendance qui sera encore plus nette cette année, puisque le Québec ne souhaite accueillir que 40 000 personnes immigrantes, soit moins que la Colombie-Britannique l’année passée.
Mais l’immigration, comme l’agriculture et les pensions de vieillesse sont des pouvoirs traditionnellement partagés entre le fédéral et les provinces, qui s’invitent en périphérie des débats. Les principaux sujets de campagne sont généralement d’abord liés aux responsabilités qui relèvent de l’État fédéral, moins à ceux qui relèvent directement de la souveraineté des provinces.
Un État fédéral
Le Canada est une confédération dont la répartition du pouvoir législatif s’effectue entre le gouvernement fédéral, qui siège à Ottawa, et les gouvernements provinciaux.
Chaque province possède son propre parlement, son gouvernement (Premier ministre et ministres), son lieutenant-gouverneur représentant la Couronne britannique, son budget, ses tribunaux, etc.
Les provinces sont souveraines en matière d’éducation, de programmes sociaux, de soins de santé, d’administration de la justice, les autoroutes, les hôpitaux, les prisons (délinquants adultes et juvéniles purgeant une peine de moins de deux ans), le mariage, la propriété, les droits civils, etc.
De son côté, le gouvernement fédéral a sous sa responsabilité les dossiers tels que la citoyenneté, les banques, la défense nationale, le service postal, le commerce international, l’assurance-emploi, la pêche, le transport des marchandises, les chemins de fer, le téléphone, les pipelines, les droits et territoires autochtones, les pénitenciers (délinquants adultes purgeant une peine de plus de deux ans), etc.
Les enjeux du scrutin du 21 octobre 2019
Dans la liste des enjeux qui risquent de retenir l’attention des électeurs canadiens ces prochaines semaines figurent en tête les questions énergétiques et environnementales. La campagne s’inscrit en effet dans le contexte du Sommet Action Climat à l’Organisation des Nations Unies, d’un mouvement mondial sans précédent pour la protection de l’environnement – et d’une polémique concernant le plan visant à augmenter la capacité de transport du pétrole de l’Alberta via le pipeline Trans Mountain vers la côte de la Colombie-Britannique.
De nombreux autres thèmes tels que l’emploi et l’éducation, la famille, la laïcité et le multiculturalisme, le commerce international ou encore les soins de santé devraient également être au rendez-vous des discussions à venir, qui culmineront les 7 octobre (en anglais) 10 octobre (en français), lors des grands débats des chefs de partis.
Pour plus d’information, rendez-vous sur le site d’Élections Canada.
Image de couverture : Basile Moratille