- Les personnes dont le statut relève de la compétence partagée entre Québec et Ottawa en vertu de l’Accord Canada-Québec. On parle ici essentiellement des étudiants étrangers et des travailleurs relevant du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET). Selon les chiffres avancés par le gouvernement, seuls un travailleur sur six sous PTET réside sur l’île de Montréal. N’est concernée par le moratoire qu’une fraction de ces travailleurs, soit ceux qui s’inscriront toujours dans le PTET pour renouveler ou présenter une nouvelle demande de permis de travail dans les six mois (ainsi que les primodemandeurs qui résident à l’étranger et qui n’entrent pas dans les cas d’exceptions).
- Les personnes qui ont le statut relève de la compétence exclusive des autorités fédérales, et dont l’acceptation échappe, en principe, à Québec : tous les autres, c’est-à-dire les demandeurs d’asile qui demandent à obtenir un permis de travail ouvert, et bien sûr les travailleurs relevant du Programme de mobilité internationale, le fameux PMI, qui représenteraient, selon les chiffres présentés en conférence de presse, la part du lion de l’immigration au Québec ; la catégorie de résidents à viser de façon prioritaire si l’on souhaite voir des effets significatifs sur la diminution de la part des temporaires au pays.
La grande famille du PMI
Le PMI, souvent employé pour parler des travailleurs étrangers temporaires que le Québec n’a pas expressément choisi, regroupe un joyeux mélange de travailleurs — dont certains ne sont d’ailleurs pas totalement étrangers aux autorités québécoises.
De fait, c’est le critère principal du PMI : ce programme d’immigration économique s’applique dès lors que le travailleur peut présenter sa demande de permis de travail, qui peut être ouvert ou fermé, aux autorités fédérales, sans que son employeur n’ait à obtenir au préalable une Évaluation de l’impact sur le marché du travail (EIMT) positive, et lui son Certificat d’acceptation du Québec (CAQ).
Mais savez-vous qui appartient à cette catégorie du PMI ? En voici une liste (non exhaustive) qui vous permettra de mettre des visages sur l’acronyme.
PMI, levez la main !
Les participants à l’un des programmes de l’Expérience internationale Canada (EIC)
Ces travailleurs, peuvent appartenir à l’une des trois catégories bien connues d’EIC, et soumises à quota annuels :
- Permis vacances-travail (PVT), un permis de travail ouvert d’une durée d’un ou deux ans selon le pays d’origine du demandeur ;
- Jeunes professionnels, un permis fermé d’une durée de deux ans maximum ;
- Stage coop international, un permis lui aussi fermé, d’une durée de douze mois au plus (en principe).
Ces permis sont non renouvelables. Un travailleur de la catégorie EIC qui souhaite rester au Québec devra généralement passer sous le régime du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), en permis fermé pour un employeur donné.
Les diplômés du Québec en permis de travail postdiplôme (PTPD)
La plupart des diplômés d’un programme d’enseignement collégial ou universitaire de plus de huit mois (ou 900 heures) prodigué par un établissement désigné sera admissible au PTPD, un permis de travail ouvert d’une durée maximale de trois ans. Ce permis est non renouvelable.
On notera que les titulaires de ce permis ont été étudiants étrangers avant d’être diplômés admissibles au PTPD. À ce titre, ils ont été acceptés par Québec à un moment récent de leur parcours, voire sont déjà admissibles à la sélection permanente au titre du Programme de l’expérience québécoise (PEQ) — Diplômés du Québec.
Les conjoints et époux de travailleurs étrangers temporaires sous PTET (et de certains étudiants étrangers)
Un travailleur étranger temporaire ou un étudiant peut être accompagné d’un ou une partenaire de vie ou d’enfants à charge qui pourraient être admissibles à un permis de travail ouvert. Pour autant, tous n’y ont pas droit.
Dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires, sont essentiellement concernés :
- Les conjoints/époux d’un TET à haut salaire, quel que soit le niveau de spécialisation de l’emploi occupé, dès lors que son permis de travail est d’une durée supérieure à six mois. Dans le cas d’un TET à bas salaire, ce dernier doit occuper un emploi spécialisé des catégories FEER 0, 1, 2 ou 3 de la Classification nationale des professions pour pouvoir rattacher son conjoint/époux ;
- Les conjoints/époux d’un étudiant étranger inscrit dans un programme universitaire de niveau maîtrise ou doctorat — hors certains programmes de premier cycle universitaire en santé, droit, éducation ou ingénierie, ainsi que certains cas de prolongation.
Le travailleur étranger peut aussi avoir à sa charge des enfants scolarisés au Québec, qui auront besoin d’obtenir un CAQ et un permis d’études dès l’âge de 6 ans ou la première année du primaire. En effet, lorsqu’on évoque le nombre d'étudiants étrangers présents au Québec, on ne parle pas seulement des individus solitaires inscrits au cégep ou à l’université. Il s’agit d’inclure aussi les enfants mineurs qui accompagnent leurs parents, puisque seuls les enfants de 18 ans et plus doivent présenter leur propre demande de permis d’études ou de travail temporaire.
Prenons un travailleur en permis fermé accompagné d’un conjoint sous PMI et de trois enfants en permis d’études inscrits au primaire et au secondaire. Dès lors que, au titre du moratoire de six mois, on lui refuse le renouvellement de son permis, cela revient en réalité à priver de statut toute sa famille, soit dans notre cas cinq résidents temporaires au total.
Les titulaires d’un Certificat de sélection du Québec
Code de dispense A73 pour les personnes qui résident au Canada
Code de dispense A75 pour les personnes qui résident au Canada et qui ont (bien) entamé leur demande de résidence permanente
Code de dispense A76 pour les personnes qui résident actuellement en dehors du Québec
Les travailleurs étrangers victimes de violence dans le cadre de leur travail
Inauguré en 2019, le Permis de travail ouvert transitoire pour personnes vulnérables (PTOTV) s’adresse à tous les travailleurs étrangers temporaires titulaires d’un permis fermé valide qui subissent ou risquent de subir des violences dans le cadre de leur emploi. Ces personnes peuvent, sous conditions, demander un permis de travail ouvert au titre du PTOTV, destiné à faciliter la recherche d’un nouvel emploi. Ces permis sont généralement valables pour une durée d’un an, non renouvelable. Une nouvelle fois, ces travailleurs sont initialement au Québec parce qu’ils ont reçu un certificat d’acceptation dans le cadre du PTET.
On rappellera d’ailleurs que le volet agricole de même que le Programme des travailleurs agricoles saisonniers relèvent du PTET, et non du PMI.
La morale de l’histoire
L’immigration n’est pas une science exacte. Elle évolue dans un environnement réglementaire a priori simple parce que cadré, mais à la fois extrêmement instable et qui regorge de subtilités, d’exceptions, de mesures temporaires, de projets pilotes et de décisions plus ou moins publicisées, comme autant de zones grises parfois mal comprises — quand elles ne sont pas carrément ignorées.
Le Québec est-il vraiment étranger (sans jeu de mots) à tous les résidents temporaires présents sous la bannière PMI ? Est-il impuissant à leur égard ? La réponse est non, de la même manière qu’une partie de l’immigration que le Québec est censé « choisir », échappe un peu à son contrôle — on pense notamment aux enfants de moins de 17 ans qui accompagnent un parent travailleur temporaire. Ces derniers doivent obtenir un CAQ et un permis d’études, avec la présentation de documents spécifiques selon leur situation. Mais leur demande n’est généralement qu’une simple formalité, et pour cause : la scolarisation des enfants qui résident au Québec est obligatoire de 6 à 16 ans.
La perméabilité entre les permis et les statuts complique, en revanche, l’accès à une information précise et juste sur le statut, la situation et l’évolution du parcours des personnes immigrantes, en particulier temporaires. Et si l’évocation de chiffres en dehors de tout contexte est un exercice bien périlleux, tirer des conclusions hâtives selon ce qui relève des compétences du fédéral ou du provincial ne l’est pas moins.
Photo : Alex Block
À propos de Basile Moratille
Directeur des contenus et des publications, Immigrant Québec et Immigrant Québec Pro.
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