Comment acheter une propriété au Québec ?
Ça y est ! Vous avez fait vos comptes, rassemblé une mise de fonds suffisante, gagné la confiance de votre banquier et vous voilà prêt à trouver la propriété de vos rêves. Au Québec, la démarche pour devenir propriétaire est en théorie rapide, mais très balisée. Voici quelques conseils pour mener à bien une transaction importante dans la vie d’un acheteur — en particulier quand il est immigrant.
Êtes-vous éligible à l’achat ?
Pour contrer l’envolée des prix de l’immobilier, notamment dans l’ouest du pays, le gouvernement du Canada a récemment (1er janvier 2023, pour deux ans) limité l’acquisition pour les non canadiens. La loi sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens (ceux qui n’ont ni la citoyenneté canadienne ni la résidence permanente), qui interdisait l’accès à la propriété durant deux ans, a toutefois été assouplie le 27 mars 2023 et a défini des exceptions.
Cette interdiction ne s’applique pas à l’achat de locaux de grandes tailles (quatre locaux ou plus) et aux propriétés situées à l’extérieur des régions métropolitaines de recensement (population totale d’au moins 100 000 habitants et son noyau doit compter au moins 50 000 habitants) ou agglomération de recensement (noyau d’au moins 10 000 habitants).
Les nouvelles modifications de la loi
- Les personnes titulaires d’un permis de travail ou qui sont autorisées à travailler au Canada en vertu du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (étudiants, jeunes professionnels détenteurs de permis de travail ou vacances-travail, etc.) peuvent acheter un immeuble résidentiel, si elles disposent d’un permis de travail ou d’une autorisation de travail demeurant valide pour 183 jours ou plus à compter de la date d’achat et si elles n’ont pas acheté plus d’un immeuble résidentiel. Les dispositions antérieures sur les déclarations de revenus et l’expérience de travail antérieure au Canada ont été abrogées.
- Les non-Canadiens qui achètent une propriété résidentielle avec un époux ou un conjoint de fait admissible à l’achat.
- Les réfugiés et les personnes protégées au sens de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.
- Les agents diplomates ou consulaires ou les États étrangers qui achètent à des fins démocratiques ou consulaires.
- L’interdiction ne s’applique pas à tous les terrains zonés pour usage résidentiel ou mixte.
- L’exception permet maintenant à des non-Canadiens d’acheter un immeuble résidentiel à des fins d’aménagement.
En janvier 2023, le gouvernement du Canada a également adopté une nouvelle loi en cas de revente précipitée de la résidence principale, afin de contrer la spéculation. Soyez certains de votre achat, car vous ne pourrez revendre avant un an, à moins de payer d’importantes pénalités (la plus-value éventuelle sera alors imposée comme un revenu d’entreprise). Il existe cependant des exceptions.
Le financement
Votre capacité de financement devra être déterminée avant votre recherche, pour rester dans votre gamme de prix. Votre achat pourra être fait comptant, mais plus généralement à l’aide d’un prêt hypothécaire, c’est-à-dire à crédit. Les courtiers immobiliers vous demanderont rapidement si vous avez une préapprobation hypothécaire — quand ils n’en conditionnent pas la visite, purement et simplement.
Vous devrez apporter une mise de fonds qui sera au minimum de 5 % du prix de la propriété, et idéalement de 20 %. En effet, si votre mise de fonds est de moins de 20 % du prix d’achat de votre maison, vous devez obtenir une assurance prêt hypothécaire auprès de la Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL).
Il existe des dispositifs en cas d’achat d’une première propriété. Vous pouvez également ouvrir et utiliser un CELIAPP, nouveau dispositif d’épargne défiscalisée.
Ensuite, un rendez-vous avec votre institution financière s’impose. En fonction de vos revenus, de votre capacité de remboursement et de votre cote de crédit, votre conseiller financier va déterminer le prêt et vous établir une préapprobation hypothécaire.
Vous devrez négocier un taux avec votre banque, qui se situe toujours au-dessus du taux directeur de la banque du Canada. Celui-ci a beaucoup augmenté au cours de l’année 2022 et en 2023 pour contrer l’inflation, et les taux hypothécaires ont suivi le mouvement.
Taux fixe ou taux variable ? L’actualité récente a sonné comme une piqûre de rappel à tous les adeptes des taux variables. Chaque fois que le taux de la Banque du Canada monte, le remboursement de l’hypothèque grimpe.
Le prêt hypothécaire ne peut, en principe, pas dépasser 25 ans afin de limiter l’endettement des ménages. Mais un prêt hypothécaire sur 30 ans sera assujetti à des règles particulières, puisque la SCHL n’offre de couverture d’assurance que pour les prêts de 25 ans au plus. Ainsi, les taux d’un prêt de 30 ans seront différents de ceux d’un prêt de 25 ans. Par conséquent, sur 30 ans, votre mise de fond devra impérativement être de 20 % minimum.
La SCHL recommande que le montant de vos frais d’occupation (remboursement de votre emprunt, taxes, chauffage) ne dépasse pas 32 % de vos revenus annuels bruts.
Mais attention ! Une hypothèque à taux fixe, même sur 25 ou 30 ans, doit être renégociée au maximum tous les cinq ans. Les bénéfices éventuels d’un taux fixe sont donc toujours temporaires, et si vous avez acheté en août 2018 à un taux directeur à 1,5 %, vous vous retrouvez en août 2023 à devoir renégocier sur la base d’un taux à 5 %, pour les cinq prochaines années.
Calculateur hypothécaire en ligne
Votre institution financière vous demandera peut-être de souscrire une assurance pour la propriété financée.
Chercher votre propriété
Au Canada, toutes les ventes d’immeubles gérées par un courtier immobilier sont inscrites sur Centris.ca (les transactions génèrent un volume de ventes de 28 milliards de dollars chaque année). Cet outil puissant permet de rechercher la propriété souhaitée avec une liste assez exhaustive de ses caractéristiques, dans la région demandée, en plus de s’inscrire à une liste de diffusion pour ne manquer aucune nouvelle inscription.
Certains vendeurs aguerris préfèrent vendre eux-mêmes leur propriété pour éviter de payer la commission du courtier immobilier (de 2 % à 5 %), qui est toujours à la charge du vendeur. Au Québec, le site le plus connu est duproprio.com.
Pour un premier achat, le recours à un courtier immobilier est fortement recommandé. La profession de courtier est encadrée par l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ), les Chambres immobilières du Québec, la Loi sur le courtage immobilier, le Code civil du Québec et un Code éthique. Tout vise à protéger le client. Il est obligatoire pour un courtier d’être rattaché à une agence immobilière. Cela garantit à la profession ses bonnes pratiques et représente un gage de sécurité pour le client.
Le courtier cherchera pour vous en fonction de vos critères et organisera les visites. Il se partagera la commission de vente avec le courtier du vendeur, mais il peut subsister une partie à votre charge.
Depuis juin 2022, la loi interdit la double représentation vendeur/acheteur pour un courtier immobilier. L’acheteur devra être représenté par un autre agent immobilier ou ne pas être représenté. Dans ce cas, le courtier immobilier du vendeur doit accorder un traitement équitable à l’acheteur.
Avant de vous déplacer, vous pouvez vérifier l’environnement sur Google Street View. S’il y a un terrain vague à côté, vérifiez par vous-même à qui celui-ci appartient, de même que les éventuels projets d’aménagement qui y sont prévus (projets municipaux, projets immobiliers, etc.). Selon les cas, votre nouvelle vie pourrait rapidement virer au cauchemar.
Envie d’acheter une belle maison centenaire canadienne ? Ces propriétés classées s’accompagnent souvent d’une foule de problèmes : refus d’assurance, travaux dispendieux soumis à autorisation, passoire thermique pour en nommer quelques-uns. Le site des biens patrimoniaux vous aidera dans vos démarches.
Les documents à vérifier
La déclaration du vendeur et la fiche détaillée
La propriété vous plaît, la visite s’est bien passée, il vous faut obtenir la déclaration du vendeur (DV). Cette déclaration contractuelle vous permettra d’obtenir une foule de renseignements sur la propriété : date de construction, d’occupation, fissures, dégâts d’eau, refus d’assurance, modifications des limites, énergies, internet, présence de vermiculite (amiante), zone inondable, servitudes, sol contaminé, pyrite, culture de cannabis, etc. Cette déclaration est remplie au meilleur de la connaissance du vendeur, mais elle reste un document opposable en cas de problèmes si le vendeur est de mauvaise foi.
La fiche détaillée de la propriété, établie par le courtier immobilier, fournit également beaucoup de renseignements, comme la dimension des pièces, du terrain, l’approvisionnement en eau et le système d’égouts (municipal ou fosse septique), et l’adresse. Vous pourrez ainsi aller voir la propriété et son environnement avant de demander une visite.
L’évaluation municipale
La fiche détaillée vous donnera également l’évaluation municipale et le montant des taxes (municipales et scolaire).
L’évaluation municipale constitue la base d’imposition pour les taxes. Elle est réévaluée tous les trois ans environ par les municipalités, sur la base des transactions immobilières effectuées dans le quartier. Elle constitue une bonne base de négociation de prix si elle est récente. À Montréal par exemple, les évaluations 2023-2025 reflètent assez bien les nouveaux prix, mais ça ne sera probablement plus vrai dans six mois ou un an.
Division ou indivision
Si vous achetez un appartement ou un condo, la fiche détaillée précisera si la propriété est divise ou indivise.
Une propriété divise (condo) vous permet de détenir une partie de la copropriété avec un numéro de cadastre distinct, et vous n’êtes responsable que pour cette partie.
La propriété indivise vous engage sur l’ensemble de la propriété. Les copropriétaires doivent détenir une seule et même hypothèque et se partagent les frais et taxes de l’ensemble de l’immeuble au prorata de leur cote-part. Seule l’existence d’une convention d’indivision peut vous protéger en cas de défaut de paiement de l’un des copropriétaires.
De plus, le caractère divis ou indivis de la propriété change la mise de fonds. Pour acheter un condo, il faut une mise de fonds minimale de 5 %, tandis que la copropriété indivise requiert une mise de fonds de 20 %.
Autre différence notable : vous ne pouvez pas louer une propriété indivise, même si les autres copropriétaires n’y voient pas d’objection. Cette interdiction concerne aussi, en principe, les parties extérieures de la propriété, comme une place de stationnement. Si vous décidez de déménager, vous devrez ainsi soit laisser votre logement vacant, soit le revendre.
Compte-rendu d’AG et certificat de localisation
En cas d’achat d’un condo, demandez et lisez bien les comptes-rendus des trois dernières assemblées générales de copropriétaires (AG). Vous pourrez prendre connaissance des travaux en cours, des travaux projetés et surtout, vous pourrez vérifier qu’il n’y a pas de procès en cours ou de mésentente entre les copropriétaires. L’obtention des états financiers (fonds de prévoyance et budgets) peut vous donner une bonne idée de l’état de la copropriété.
Le certificat de localisation, qui définit les mesures exactes de la propriété, doit vous être fourni. Pour l’achat d’une maison, vous pouvez également consulter le cadastre en ligne, qui vous indiquera, en entrant l’adresse, le numéro de cadastre, le nombre de lots et la forme du terrain. Vous pourriez avoir des surprises.
Garanties
Les propriétés sont vendues avec ou sans garantie légale. La garantie légale vous protège contre les vices cachés.
La vente sans garantie légale s’effectue aux risques et périls de l’acheteur et n’offre pas de recours en cas de problèmes. C’est souvent le cas lorsqu’il s’agit d’une succession, car les vendeurs connaissent mal la propriété.
La promesse d’achat
Vous avez eu le coup de cœur et vous êtes prêt à faire une offre ? Votre promesse ne s’arrête pas au prix offert, car l’offre doit inclure la date d’occupation, d’éventuels tests de contamination, les modalités et délais de financement (beaucoup plus rapide avec une préapprobation hypothécaire), le versement d’un acompte, les inclusions, la date de rendez-vous chez le notaire, la date d’occupation…
Surtout, vous pouvez conditionner votre promesse à la réalisation d’une inspection de la propriété. Cette inspection est vivement recommandée. Un inspecteur en bâtiment va inspecter la propriété de fond en comble, et produire un rapport détaillé sur son état.
Vous pourrez ensuite décider, si le rapport est mauvais, de maintenir votre promesse d’achat, de revoir votre offre à la baisse ou d’annuler votre offre d’achat sur la base de l’inspection.
Dès lors où les conditions de la promesse d’achat sont réunies, elles sont levées et le processus d’achat se poursuit. L’occupation peut être très rapide au Québec : une trentaine de jours.
Le notaire et la taxe de bienvenue
Le notaire va sceller la transaction sur la base de la promesse d’achat. Les conditions ayant été réalisées, la transaction est officialisée.
C’est normalement à l’acheteur de désigner son notaire. Ce dernier va examiner les titres, rédiger l’acte de vente, préparer les ajustements (prix de la copropriété et les proratas de taxes et frais de condos), et déposer l’acte de vente au bureau de la publicité des droits de la circonscription foncière afin d’officialiser le titre de « propriétaire » de l’acheteur.
S’il n’y a pas de tarifs imposés, les honoraires du notaire sont toutefois réglementés par un code de déontologie. Il faut compter un minimum de 1 500 $ CAN à 2 000 $ CAN de frais de notaire, plus les proratas de taxes.
À peine installé dans votre nouveau chez vous (entre le 3e et le 6e mois suivant votre visite chez le notaire), vous recevrez la taxe de bienvenue (droit de mutation immobilière) de la municipalité. Elle est basée sur le montant le plus élevé entre l’évaluation municipale et le prix de vente (environ 9,5 %).