Marché du travail : ce qu’il faut savoir pour bien définir son projet

Avant même de se lancer dans la rédaction et dans l’envoi à tout-va de son CV, bien cerner son projet de recherche d’emploi est incontournable. Et, pour y parvenir, il est essentiel de comprendre les particularités du marché de l’emploi québécois.

Première caractéristique de ce marché : son faible taux de chômage (5,6% en août 2018 selon Statistique Canada). Depuis quelques mois, les médias n’hésitent plus à parler de pénurie et relaient les histoires de restaurants et d’entreprises à l’existence menacée par le manque de personnel.

« C’est un marché favorable aux chercheurs d’emploi », résume Valérie Roy, directrice générale de l’Alliance des centres-conseils en emploi (AXTRA). « De nombreux postes sont à combler en raison du vieillissement de la population conjugué à la baisse de la natalité. » Au premier trimestre 2018, les chiffres de Statistique Canada montrent une hausse de 37% du nombre de postes vacants au Québec, comparé à l’année précédente.

Les immigrants davantage touchés par le chômage

Cependant, ce contexte propice ne signifie pas que tous les nouveaux arrivants trouveront rapidement un emploi dans leur domaine. « Cela peut prendre 3 à 6 mois », avertit Corinne Cauveau, qui est notamment responsable du volet intégration au marché du travail au sein de l’organisme d’aide aux nouveaux arrivants ALPA.

« Le taux de chômage des immigrants reste supérieur à celui des natifs », ajoute-t-elle. En effet, même s’il a bien baissé au cours des dernières années, le taux de chômage des immigrants arrivés depuis 5 ans ou moins demeure plus élevé que la moyenne. En août dernier, il atteignait 13,2% au Québec, d’après Statistique Canada.

De plus, la pénurie de travailleurs ne frappe pas tous les secteurs. La liste des professions en déficit de main d’oeuvre, publiée par la Commission des partenaires du marché du travail, met surtout en exergue le manque d’ingénieurs, de techniciens, d’infirmières, d’ouvriers agricoles ou encore de mécaniciens, de programmeurs et de professionnels du domaine des services financiers et de l’assurance.

Attention également à la cinquantaines (54 exactement) de professions dont l’accès est régi par les 46 ordres professionnels. Malgré la pénurie, les règles permettant d’exercer en tant qu’ingénieur, médecin, architecte, géologue, comptable ou encore infirmière demeurent strictes.

Se faire guider

Si le Québec a besoin de main-d’œuvre, il peut y avoir un décalage entre le marché de l’emploi et des immigrants qui arrivent dans un univers en apparence familier et pourtant parfois très éloigné de celui qu’ils ont connu dans leur pays d’origine. « Il faut vraiment s’informer sur la réalité de son métier au Québec », met en avant Corinne Cauveau. « Les titres de postes sont différents, certains titres n’existent même pas. Beaucoup de gens ignorent comment se nomme leur profession ici. »

Consulter l’outil IMT en ligne ou s’informer auprès d’un conseiller en emploi permet de gagner un temps précieux dans la recherche de la jobtant attendue. Les spécialistes sont également là pour apprendre aux nouveaux arrivants comment découvrir le fameux marché caché (voir la section Fiches pratiques). En effet, une bonne partie des postes sont pourvus sans affichage d’offres d’emploi. Longtemps, on a estimé que 70 à 80 % du marché de l’emploi était caché. Pour Corinne Cauveau, la taille de cette partie immergée de l’iceberg s’est réduite grâce aux réseaux sociaux comme LinkedIn, mais savoir comment l’explorer reste indispensable.

Les PME, employeurs numéro

Bon nombre de nouveaux arrivants pensent d’abord à postuler auprès de grandes entreprises, qui sont plus visibles. « Ce sont pourtant les PME qui embauchent le plus au Québec », explique Corinne Cauveau. Selon les données de l’Institut de la statistique du Québec, plus de 9 salariés sur 10 du privé travaillaient pour une PME en 2015. Les petites entreprises dominaient puisque 70 % des postes se trouvaient dans les entreprises de moins de 100 employés.

Les grandes entreprises attirent les candidats notamment en raison de la qualité de leurs avantages sociaux, mais les processus de recrutement peuvent être longs et la concurrence forte. Généralement, elles offrent un environnement de travail plus structuré que les PME. Et leurs départements des ressources humaines ont mis au point des outils d’intégration et d’accompagnement à destination de leurs recrues venues d’ailleurs. Toutefois, les PME ont l’avantage de proposer un environnement de travail souvent plus familial, où faire preuve de polyvalence constitue un atout.

Autres avenues à considérer : la fonction publique provinciale, qui représente 60 000 salariés, et fédérale, ainsi que le secteur des organismes à but non lucratif (OBNL), auquel les immigrants pensent peu quand vient le temps de trouver du travail. « En Amérique du Nord, les OBNL sont très actifs », souligne Valérie Roy. « Ils peuvent constituer des portes d’entrée intéressantes pour les nouveaux arrivants. Les OBNL étant animés par certaines valeurs, l’intégration peut y être plus douce qu’ailleurs. »

Les régions courtisent les nouveaux arrivants

Environ neuf immigrants sur 10 choisissent de poser leurs valises à Montréal et délaissent les régions. Pourtant, elles manquent cruellement de main-d’œuvre. Le Québec a donc entrepris un vaste effort de régionalisation de l’immigration. Résultat, la plupart des régions déroulent le tapis rouge aux nouveaux arrivants pour les convaincre d’élire domicile sur leur territoire.

Plusieurs OBNL mettent sur pied des voyages de prospection gratuits à partir de Montréal pour découvrir la Mauricie, le centre de la province ou encore Québec et visiter des entreprises. « On en organise trois ou quatre fois par an », dit Anne Dusseault, agente de régionalisation en diversité culturelle au sein de l’organisme Accès Travail.

Stratégie Carrière, qui est situé à Trois-Rivières, se rend aussi à Montréal pour rencontrer les nouveaux arrivants et leur parler de possibles futurs employeurs. « Et, on met en place des autobus partant de Montréal-Nord le matin et revenant le soir pour amener des gens travailler dans notre région », explique son directeur général Robert Proulx. Son OBNL affiche un taux de placement de 80%. À Victoriaville, Anne Dusseault va même en voiture chercher à la station d’autobus les personnes venues de Montréal pour passer une entrevue, avant de leur faire découvrir la ville.

Grâce à Emploi-Québec, ces organismes sont en mesure d’offrir du soutien financier aux immigrants qui souhaitent trouver du travail à l’extérieur du Grand Montréal. Par exemple, une personne devant aller passer une entrevue en région peut être remboursée de ses frais de déplacement en autobus ou en auto. « Une aide au déménagement pouvant atteindre 1 000 dollars peut également être octroyée », indique Anne Dusseault. Dans les régions éloignées, certains employeurs sont prêts à payer le déménagement de leurs recrues. Avec le programme Projet de préparation à l’emploi d’Emploi-Québec, un chercheur d’emploi peut bénéficier d’une rémunération pendant quelques semaines, le temps d’être formé à la rédaction de CV et à l’art de réussir les entrevues.

Des experts pour éviter de se tromper

Avant de songer à s’établir en Estrie ou en Gaspésie, il faut se rappeler que les besoins varient selon les régions, chacune d’entre elles ayant développé ses propres créneaux d’excellence. De plus, les critères de financement imposés aux OBNL font que certaines initiatives mentionnées plus haut sont réservées aux immigrants déjà résidents permanents ou ayant déjà reçu leur certificat de sélection du Québec (CSQ).

Pour s’y retrouver dans ce dédale d’informations, le plus simple est de faire appel aux services gratuits d’un conseiller en emploi ou à un organisme de soutien aux immigrants. « Se faire accompagner par un professionnel est nécessaire car il est facile de se perdre tant c’est complexe », insiste Valérie Roy. Des organismes montréalais comme l’ALPA contribuent au mouvement de régionalisation de l’immigration. Il est donc possible d’être guidés vers les organismes régionaux adéquats à partir de Montréal.

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